L' heure de la marée n' était pas
favorable pour une sortie du Golfe le samedi matin. Aussi avons
nous décidé de partir dès le vendredi soir
pour Port Navalo afin d'être à pied d'oeuvre pour
la traversée vers les Îles de bonne heure le samedi.Le
"chargement" du bateau se fait aisément tant
le DC20 est bien conçu pour un court séjour à
deux. Il dispose de rangements intérieurs plus que convenables
et ses 4 coffres accessibles du cockpit sont particulièrement
grands ... ce qui permet de tout caser. La mise sous voiles
est rapide et très vite nous prenons la route sous un beau
soleil vers 19h30. Le vent du nord qui nous pousse gentillement
grand largue, nous fait réciter les îles du golfe
sur notre passage : Boued et sa tour de guet, Lerne, Arz, Bouedic,
les Logoden. En passant devant Arradon, un muscadet met sous voiles
et prend la même route que nous. Le passage dans les courants
de la pointe d' Arradon se fait "au petit poil" et nous
le distançons. C' est ensuite Creïzic, le passage
du courant de Berder puis Er Lannic où un énorme
cata avec qui nous naviguons bord à bord, provoque quelques
émotions à Manou. Enfin, nous arrivons à
Port Navalo, où j' avais prévu de prendre un mouillage
en contournant le Faucheur. La prise de bouée se fait tranquillement
sans effrayer les bars "énormes" qui attendent
la marée montante et remontent déjà dans
les contre courants. Un pêcheur est à l' affût
mais il ne prendra rien de la soirée. Le nichoir proposé
aux sternes à la bouée la plus proche du bateau,
est occupé par un couple qui fonce sur tous les goélands
qui traînent dans les parages. Dès que la femelle
s'envole, j'observe aux jumelles les trois oeufs posés
dans une simple boucle de gros cordage. J' espère que la
nichée ira à son terme car ces oiseaux deviennent
rares. Leur dispartition me toucherait beaucoup tant leurs plongeons
et leurs vols gracieux rythment nos étés sur l'eau.
Je crois savoir qu' il s' agit en outre, de l' espèce qui
a le vol de migration le plus long. Elle rallie régulièrement
les régions arctiques puis retourne en antarctique.Nous
pique-niquons dans le cockpit pour admirer le coucher de soleil.
Je monte sur la cabine pour prolonger le spectacle. Les couleurs
gris métal envahissent le plan d' eau. Deux éclairs
de lumière, l' un vert l' autre blanc s' allument à
la tombée de la nuit pour marquer l' entrée de Locmariaquer.
Nous restons silencieux à écouter .. la nuit et
la mer. L' heure du coucher arrive enfin. Je prépare les
confortables couchettes du DC20. D'une largeur plus que suffisante
:110 cm chacune .... elles sont séparées par le
puits de dérive .... il y a des limites au confort !!.
Les couchettes du DC20 sont bien faites sur Plijadur, elles se
rabattent sur le puits de dérive, les coussins reliés
par une languette en cuir ne glissent pas et forment un excellent
matelas.La nuit est très agréable. Le soleil est
déjà assez haut lorsque nous nous réveillons.
Je sors le réchaud directement branché sur la bouteille
de gaz et met le café à chauffer. Le petit déjeuner
est pris dans la cabine après avoir replié le lit
et rangé les sacs de couchage. Je fais plonger la dérive
pour dégager complètement la table. Après
cette reprise en douceur, nous ne tardons pas à hisser
la GV. Départ grand voile seule, le bateau glisse vers
les courants. Manou hisse du cockpit le génois lorsque
nous arrivons dans la "mousse" pour assurer la vitesse
et la stabilité du bateau. Cap au 180° direction Houat.
La sortie du golfe se passe sans souci et nous sommes évacués
comme un vulgaire bouchon par la marrée descendante. Dès
Méaban les courants contraires nous attendent. Vent plein
travers, les vagues sont formées ... pas hyper hautes 1
à 2 mètres mais au final assez cassantes. Le DC20
est beaucoup moins arrêté par la vague que le 590
mais il faut bien reconnaître que le traversée n'est
pas confortable avec un vent forcissant. Pour un week-end annoncé
comme très beau avec un petit vent sympa, ce n'est pas
tout à fait cela et manou fronce du nez .... au rappel.Comme
à chaque navigation, je ne peux m' empêcher de faire
la course avec les gros et comme d'hab ... rares sont ceux qui
me passent (ils ne savent pas que je fais la course !). A l'approche
de Houat, nous nous éloignons des filières à
moules pour nous rapprocher de la plage des grands sables. Cette
superbe plage convexe est exposée au vent d' Est. Le mouillage
devrait donc se faire sur la côte sauvage de l' île
pour être protégé. Mais les mots "côte
sauvage" ne plaîsent pas du tout à manou. Nous
décidons au final d' aller sur Hoëdic pour rejoindre
une superbe petite crique que je connais bien.L'arrivée
se fait à pleine marée basse. Je m'approche donc
très près de la côte et je mouille toute ma
chaine + une longueur suffisante de bout. Une petite dizaine de
bateaux sont ancrés plus au large dans la crique. Le déjeuner
est pris à bord, puis nous gonflons notre annexe qui n'est
autre qu'un jouet de plage. L'arrivée à terre dans
la vague nous montre qu'il faut vraiment investir dans une petite
annexe!!. J'ai hésité à le faire jusqu'à
présent car je trouve les annexes particulièrement
encombrantes pour l'usage que l'on en fait ... un jour ou l'autre
il me faudra évoluer !Le tour de l'île proposé
par Anne, sous un gros cagnard, ne me plait qu'à moitié
et je cherche l'ombre dès que je peux. Nous sommes à
coup sûr dans un jour de canicule !. A terre, par endroit
les pointes des mats hérissent la dune. Les criques au
nord de l'île sont magnifiques. L'eau de couleur vert -
bleu est très claire et laisse admirer les fonds sableux
entrecoupés de roches à laminaires. L'ancien garage
de la SNSM est maintenant transformé en résidence
secondaire. On trouve plus mal comme situation !!. Nous arrivons
enfin à la capitainerie. J'ai encore le souvenir de nos
dernières vacances sur l'île où dès
l'ouverture, je devais passer la raclette dans le local des douches
pour nettoyer le sol inondé et couvert de sable. La propreté
n'était pas le fort des deux jeunes chargés d'encaissé
le prix de la douche !!. Je suis à nouveau assez déçu
par cet aspect des choses .. car les WC publics du port sont toujours
aussi catastrophiques. Ce manque de propreté est assez
ahurissant pour une île qui reçoit autant de monde
... et devrait soigner l'image d'une île préservée!
Nous finissons par trouver des WC très propres juste à
côté de la mairie. Les élus ont visiblement
pris conscience de cette triste réalité. Merci à
eux mais il faut continuer le combat !Nous allons prendre ensuite
un café à la Trinquette, bistrot mythique, lieu
de rassemblement des iliens et des voileux. Après cette
pause appréciée nous continuons notre tour.La visite
rapide du fort militaire d' époque Napoléon III,
nous permet d'admirer un magnifique point de vue à partir
du bastion sud -est.Le passage près de l'ancien port qui
découvre entièrement à marée basse,
nous montre que tous les bateaux ne sont pas égaux face
au tangage. Comparé aux autres bateaux, Le mouvement du
mât d'un bateau en alluminium de 11 - 12 m signale sa très
forte aptitude à secouer ses occupants. Plus loin, les
traces d'Erika sont encore présentes par endroit. Revenu
à notre crique, je décide de rejoindre le bateau
pour une sieste réparatrice et échapper un temps
au soleil. Manou choisit de rester sur la plage mais elle ne résiste
pas longtemps. Elle doit plonger dans l'eau très fraîche
de l'île pour abaisser sa température de corps. Après
la sieste, je suis amené à en faire de même
car le soleil cogne toujours très dur !La soirée
est super cool au mouillage. Le dîner à bord se fait
dans un cadre magnifique. A proximité du mouillage, un
couple mouille un petit filet à partir d'une annexe pneumatique.
Le coucher de soleil est vraiment superbe et se prolonge très
longtemps. Nous sommes en juin. La nuit est calme. Le dimanche
matin, je note 30 bateaux au lieu des 10 décomptés
à notre arrivée. Visiblement la crique plaît.
Heureusement le faible tirant d'eau du DC20, nous éloigne
du gros de la troupe, ..... tranquille Emile !!.Le vent se fait
attendre, pétole complète. J'en profite pour nettoyer
le cockpit à grands coups de seau d'eau. Les risées
arrivent, je les vois assez loin en direction de Belle île.
Nous sommes prêts à partir. Dès que le vent
est là, les voiles sont hissées et nous sortons
les premiers de la crique au raz des cailloux ... direction Houat
dans un premier temps puis Port Navavo, dès les dangers
parés. Manou sort le sac de pêche pour mettre la
ligne de traîne dans l'eau.Elle me fait remarquer une brume
bizarre venant de Belle île. Très vite Hoëdic
où nous étions tout à l'heure devient invisible
puis c'est au tour de Houat, enfin le bateau qui nous suit à
150m disparaît à son tour. Bientôt nous avons
à peine 50 m de visibilité. Manou sort la corne
de brume et nous restons attentifs. Plusieurs bateaux croisent
notre route devant nous. Je me méfie d'un bateau qui viendrait
droit devant nous. Heureusement, car apparaît dans la brume
un bateau marchant vite en route de collision frontale. Le visage
de la femme dans le cockpit me montre qu'elle ne sait que faire
sinon appeler son mari qui est dans la cabine. Je modifie mon
cap. Le mari sort enfin, mais les deux bateaux se croisent déjà.
Si je n'avais pas été attentif, c'était l'accident
!Toute la traversée de la baie se fait dans une brume très
épaisse et froide. Nous venons buter enfin, après
deux heures de navigation dans le coton, sur une côte que
nous découvrons vraiment au dernier moment. Mais où
sommes nous ?. Les repères sont faussés. Nous ne
reconnaissons pas cette plage pentue ! Nous croyons deviner le
Grand Mont mais ce n'est peut être pas cela. Avec la ligne
de traine ,j'ai dû ralentir régulièrement
pour rester à la bonne vitesse de pêche. Ces changements
d'allure, grand voile débordée, ont fini par me
faire perdre .. le nord !! et je ne sais plus bien où je
suis. Etant parti au près serré sur la route directe
de Port Navalo, je suppose que je suis trop au sud. Je décide
donc de remonter et opte pour une route longeant le plus possible
la côte en tirant des bords ... vent de bout. Les vagues
s'atténuent enfin. Je me crois sous Méaban car je
suppose que l' île doit casser les vagues.... !. A quelques
mètres de nous, une tour apparaît dans la brume:
"Kerpenhir". Nous sommes arrivés pile poil à
l'entrée du Golfe et nous ne le savions pas. Nous rentrons
dans le golfe et phénomène extraordinaire, la brume
s'arrête comme coupée au couteau!. Le ciel bleu et
le soleil inondent le bateau. Ouff, nous sommes enfin sortis de
cette purée froide que nous avons subie pendant plus de
deux heures. Dans le golfe, les plages ont été prises
d'assaut. Nous remontons entièrement le golfe pour retrouver
notre mouillage vers les 15h. La persévérance de
Manou est enfin récompensée puisque, près
d'Illur, elle prend deux maquereaux portion qui finiront sur le
barbecue. Le bain dans les eaux chaudes du Golfe est très
apprécié et termine superbement un week end magnifique
... riche en émotions et en images que je vous propose
de partager maintenant.
Photos
Alain